Une croisade pour faire connaître aux travailleurs leurs droits au Canada

Foto: RADIO-CANADA / MAGGIE MACPHERSON/CBC.
Par Alejandro Estivill, consul général du Mexique à Montréal
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Entre le 5 et le 9 septembre 2022, tous les consulats mexicains au Canada (ainsi que ceux des États-Unis) se sont joints à une croisade de diffusion, de développement d’activités, de conseils et de travail conjoint avec des organisations alliées pour déployer une Semaine des droits du travail (SDT), le premier à se tenir sous cette forme au Canada dans la longue histoire des relations de travail entre le Mexique et ce pays. L’objectif et le grand emblème de cet effort est le plus évident que l’on puisse imaginer : « mieux les travailleurs sont informés et préparés sur leurs droits lorsqu’ils arrivent et travaillent au Canada, plus ils ont de chances de se défendre ».

L’action consulaire est très pertinente pour favoriser un climat d’équité, de justice, de respect des règles et d’élimination des abus. Cependant, elle est toujours insuffisante en raison du volume des cas qui peuvent se présenter au fur et à mesure de l’augmentation de la population active et des participants aux programmes de travail temporaire dans ce pays. Rien ne peut remplacer la détection en temps utile et l’action que le travailleur lui-même peut entreprendre dans un cas précis.

L’intuition du travailleur, directement impliqué dans la situation spécifique qu’il vit, une meilleure connaissance des lois qui l’assistent, sa réaction rapide et sa dénonciation opportune peuvent arrêter un problème avant qu’il n’ait de graves conséquences pour son économie, sa santé ou sa situation migratoire (avant même qu’il ne s’engage dans un voyage qui peut se dérouler sans les garanties nécessaires pour éviter de tomber dans une tragédie due à l’exploitation). Ce sont des mesures d’autoprotection essentielles à prendre avant que ceux qui veulent abuser de leurs efforts et de leur enthousiasme de travailleur acharné ne les exploitent et, pire encore, avant qu’ils ne profitent du sentiment d’impuissance que ressentent la plupart des travailleurs temporaires étrangers.

Il est tout aussi important que ce travailleur connaisse les organisations qui peuvent l’aider et qu’il soit mieux relié à elles. Ces organisations, qu’elles soient gouvernementales ou dans le cas des ONG d’aide et de conseil, sont de plus en plus nombreuses et fortes, et étendent clairement les capacités limitées d’un consulat. Au cours des trois dernières années seulement, le Consulat général du Mexique a établi des alliances stratégiques avec des entités clés telles que RATTMAQ, le SOIT, Immigration Québec et le CRIC, entre autres.

Dans le cadre de cette SDT, le Consulat général du Mexique à Montréal a participé à 8 événements spécifiques : deux conférences de base sur l’immigration sur «Comment venir travailler légalement au Canada» et «Comment détecter et éviter la fraude lors de la réception des offres d’emploi» ; deux conférences juridiques spécialisées offertes par un avocat consultant et consacrées aux «Droits du travail au Québec» et «Droits et procédures en cas d’accidents du travail». Le travail conjoint s’est également développé avec l’organisation RATTMAQ, qui aide les travailleurs agricoles saisonniers en diffusant des vidéos, et un séminaire qui a eu lieu dans une ferme avec des travailleurs agricoles saisonniers, avec la participation de membres de plusieurs entreprises. Un accord de collaboration a également été établi entre les consulats du Guatemala, du Honduras, du Salvador et du Mexique afin de partager des informations, dans le but de pouvoir alerter sur des cas et même de collaborer conjointement ou individuellement au nom des travailleurs de l’une de ces nationalités de l’un des consulats concernés.

Enfin, une session conjointe a été organisée avec la CNESST (Commission des normes d’équité, santé et sécurité du travail du Québec, organisme gouvernemental responsable de la relation de travail en vertu des lois de la province). Cette session a été consacrée à faire en sorte que les travailleurs se familiarisent et se sentent proches de la CNESST, qu’ils comprennent mieux son fonctionnement et qu’ils puissent accéder facilement à ses services. L’objectif était de faire tomber les barrières au signalement et de faire tomber la peur des processus qui sont déployés pour enquêter sur les abus. Mais il s’agissait aussi de motiver la CNESST elle-même à intégrer des formules permettant d’accéder à ses fonctionnaires en espagnol et par des moyens plus rapides tels que whatsapp.

L’expérience qui a été déployée avec le SDT n’est pas une tentative illusoire de faire tout ce qui doit être fait en une semaine. Au contraire, il ne s’agit que d’un exemple du type d’activité systématique menée tout au long de l’année par un consulat pour apporter des solutions plus structurelles aux défis auxquels est confronté un travailleur qui se rend dans un autre pays, qui n’est pas familier avec la culture, qui a une faiblesse dans la communication linguistique et qui se sent souvent sans protection dans l’exercice de ses droits.  Il est juste de dire que la semaine des droits du travail a lieu chaque semaine pour un consulat ; cependant il est important de mettre en lumière tout ce travail au début du mois de septembre, lorsque c’est la fête du travail, alors que l’attention des compatriotes mexicains et centraméricains est plus grande à l’occasion de leurs fêtes nationales respectives.

Il est également important de coordonner les actions entre tous les consulats et ceux des États-Unis, car même si les défis sont différents dans chaque endroit, le sentiment d’appartenance à un groupe et l’échange des meilleures expériences donnent plus de force à ce qui est fait.

Tout cela est bien beau, mais le SDT a une autre raison fondamentale d’exister et cela concerne l’implication des autorités canadiennes qui est nécessaire de toute urgence. Le consulat mexicain se félicite à cette occasion de la façon dont la CNESST a réagi à cette idée et nous savons qu’elle se joindra à des efforts similaires à l’avenir. Notre ambassade à Ottawa a également organisé une conférence avec les autorités fédérales représentées par le Ministère fédéral du Travail et du Développement social Canada (ESDC), invoquant la pertinence de ces actions.

Cette urgence reflète le fait que la réalité dépasse peut-être la capacité de réaction du gouvernement. L’énorme demande de main-d’œuvre exprimée dans de multiples secteurs canadiens, associée à des droits et obligations au travail peu pénétrés et peu diffusés, peut facilement dérouter ceux qui cherchent un emploi au Canada, notamment dans les pays d’Amérique latine. Ils reçoivent des informations incomplètes, sont victimes de problèmes, d’abus, d’exploitation, d’attentes trompeuses et de la présence d’intermédiaires peu scrupuleux qui voient dans le vide de l’ordre gouvernemental l’occasion de faire du profit en exploitant la bonne foi des travailleurs. Ces intermédiaires exploitent également les besoins et les désirs des entreprises pour obtenir un gain financier rapide.

Il n’a jamais été aussi pertinent que maintenant de mener une bataille de première ligne : que les travailleurs qui arrivent au Canada connaissent les règles du jeu dans lequel ils entrent, qu’ils connaissent les alliés dont ils disposent pour participer à ce marché du travail concurrentiel. Nous exhortons (et remercions Hispanophone pour cela) tous ceux qui envisagent de travailler au Canada, et en particulier au Québec, à se rendre sur les canaux de médias sociaux de notre consulat et à vérifier les nombreuses choses pertinentes qui se sont produites pendant cette Semaine des droits de l’emploi 2022.


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